Foire aux questions sur la féminisation lexicale et la rédaction épicène
Cet article répond aux questions les plus fréquemment posées au sujet de la féminisation des appellations de personnes et de la rédaction épicène.
1. Pourquoi utiliser les appellations de personnes au féminin dans les textes?
Le fait que des métiers et des professions qui étaient plus souvent occupés par des hommes se soient peu à peu ouverts aux femmes a créé un besoin : il a fallu rendre compte de ce nouveau contexte socioprofessionnel. Ainsi, des appellations au féminin existantes ont pu connaîtreSelon les rectifications de l’orthographe, on peut aussi écrire : connaitre. un regain de vitalité ou être employées dans un sens nouveau, et de nouvelles ont été créées.
Pour des écrits plus représentatifs des personnes auxquelles on s’adresse ou dont il est question, il convient, lorsque cela s’y prête, de recourir à des appellations au masculin et au féminin. D’autres procédés peuvent aussi être mis à profit pour qu’un texte ne soit pas rédigé exclusivement au masculin générique.
2. Utiliser les appellations de personnes au féminin est-il obligatoire?
L’emploi d’appellations au féminin n’est pas obligatoire, mais, pour désigner une femme, l’emploi d’une variante féminine est recommandé depuis 1979 par l’Office québécois de la langue française. Un avis de recommandation officielle de l’Office, intitulé Féminisation des appellations de personnes et rédaction épicène, paru en 2015 et révisé en 2018, continue d’encourager l’emploi des appellations au féminin et promeut la rédaction épicène afin de bien représenter à la fois les hommes et les femmes dans les textes.
3. Peut-on mettre, en début de texte, une note explicative qui justifie l’emploi du seul genre masculin pour alléger le texte?
L’Office québécois de la langue française déconseille l’emploi d’une note comme « Pour ne pas alourdir le texte, le masculin est utilisé comme générique et désigne donc aussi bien les femmes que les hommes » (voir l’avis de recommandation Féminisation des appellations de personnes et rédaction épicène.)
Lorsqu’une telle note est utilisée, le rédacteur ou la rédactrice du texte dont il est question ne cherche pas particulièrement à donner à la fois de la visibilité aux hommes et aux femmes.
L’Office privilégie plutôt le recours aux diverses possibilités qu’offrent la féminisation lexicale et la rédaction épicène, résumées dans un aide-mémoire.
4. L’accord se fait-il encore au genre masculin?
Les règles grammaticales n’ont pas changé. Le masculin demeure le genre qui a une valeur générique, c’est-à-dire le genre grammatical utilisé pour désigner les personnes sans distinction de sexe (par exemple, les enseignants pour parler des enseignants et des enseignantes).
On comprendra toutefois que l’emploi exclusif du masculin générique (par exemple, l’employé lorsqu’il n’est pas uniquement question d’hommes) ne permet pas de donner de la visibilité à la fois aux hommes et aux femmes dans les textes.
Ainsi, dans le cas d’un adjectif se rapportant à des noms de genre grammatical différent, l’accord se fait au masculin. Par exemple : les politiciennes et les politiciens étrangers, la sauveteuse ou le sauveteur embauché.
5. Peut-on utiliser les doublets abrégés (informaticien(ne), agriculteur(‑trice), étudiant[e]s, travailleur[‑euse]) pour montrer que l’on parle aussi des femmes?
Les textes suivis offrent suffisamment d’espace pour qu’on y utilise les doublets complets. L’emploi de ces derniers est donc recommandé.
Toutefois, la rédaction épicène est souvent mise de côté au profit du masculin générique dans les contextes où l’espace est restreint (par exemple dans les tableaux, les formulaires, les publications sur des plateformes de microblogage) ainsi que dans les écrits de style télégraphique.
Par conséquent, l’Office québécois de la langue française juge que l’emploi des doublets abrégés (comme dans les exemples ci-dessus) est une option acceptable, mais seulement dans ces types de contextes.
L’Office privilégie les parenthèses ou les crochets pour former un doublet abrégé. Ces signes doubles sont ceux dont l’utilisation est susceptible d’entraînerSelon les rectifications de l’orthographe, on peut aussi écrire : entrainer. le moins de difficultés. Les autres signes parfois employés pour créer des doublets abrégés (trait d’union, majuscule, point médian et virgule, par exemple) ne sont pas retenus par l’Office en raison des problèmes que leur emploi pose.
6. Peut-on employer les noms qui se terminent en -eure comme professeure ou directeure?
L’emploi des noms féminins correspondant à des masculins en ‑eur peut poser certaines difficultés. Pour pallier l’absence de noms féminins, on a créé, selon le procédé général de formation, de nouveaux féminins par l’ajout d’un e muet au nom masculin. On a ainsi créé, par exemple, professeure, docteure, gouverneure. L’emploi de ces formes est tout à fait justifié et encouragé, puisque ces noms permettent de nommer les femmes dans leur fonction avec une appellation au féminin.
Par contre, d’autres noms en ‑eure, comme directeure et chercheure, ne sont pas retenus, puisqu’ils ne correspondent pas à la forme régulière du féminin, contrairement aux féminins directrice et chercheuse, correctement formés et déjà bien établis en français.
Pour en savoir davantage sur les formes en ‑eure retenues et non retenues, vous pouvez consulter les articles Appellations de personnes en ‑eur et en -eure et Féminin des appellations de personnes en -eur.
7. Qu’est-ce qu’un mot épicène?
Un mot épicène désigne ou caractérise une personne et a la même forme au genre masculin et au genre féminin. Par exemple, les noms ministre, collègue et artiste, les adjectifs brave, agréable et magnifique, et les pronoms nous, on et qui sont tous épicènes. Ils pourront donc désigner ou caractériser aussi bien des hommes que des femmes.
De son côté, le terme rédaction épicène fait référence à une pratique d’écriture qui privilégie l’emploi des désignations masculines et féminines coordonnées (les doublets complets) et de la formulation neutre (notamment les noms collectifs et les tournures épicènes) lorsqu’il est question de personnes.
8. Comment écrire un texte qui intègre les appellations au masculin et au féminin, mais qui ne soit pas trop lourd?
Concevoir dès le départ un texte épicène permet une rédaction de qualité. Il existe des procédés d’écriture qui permettent une féminisation légère ou encore une formulation neutre (avec les noms collectifs et les tournures épicènes, par exemple).
Pour en savoir davantage, vous pouvez consulter l’article Principes généraux de la rédaction épicène, et les sous-thèmes Doublets complets et Formulation neutre.
9. Pourquoi les noms féminins de personnes ne sont-ils pas tous dans les dictionnaires?
Il arrive que les appellations de personnes au masculin soient les seules à figurer dans les dictionnaires, qui ne consignent pas certains féminins existants, que ces derniers soient bien implantés ou peu employés dans l’usage.
Par exemple, dans certains ouvrages de référence, le féminin écrivaine, pourtant attesté de très longue date, n’est pas inscrit en entrée à côté de la forme au masculin. Il est néanmoins tout à fait correct, et il est courant, notamment au Québec. Il ne faut donc pas craindre d’utiliser des noms féminins, car la langue s’enrichit grâce à la néologie. On doit cependant respecter la logique du système. Soulignons que les choses évoluent et que les dictionnaires, d’une édition à l’autre, accueillent peu à peu les nouvelles formes.
10. La féminisation est-elle pratiquée ailleurs qu’au Québec?
La féminisation des appellations de personnes et des textes est pratiquée dans plusieurs pays de la francophonie. Au Québec, où l’emploi des noms féminins est le plus entré dans l’usage, cette féminisation a débuté dès 1979, lorsque l’Office québécois de la langue française a publié des recommandations officielles à ce sujet. L’Office a réaffirmé sa position en 2018 en publiant un avis de recommandation, intitulé Féminisation des appellations de personnes et rédaction épicène.
En Belgique, un décret a été publié en 1993 stipulant que les textes de l’Administration devaient être féminisés. En Suisse, la féminisation des titres a débuté dans les années 1990; dans le canton de Genève, une loi a imposé dès 1988 de féminiser les textes gouvernementaux. En France, on doit aussi utiliser, depuis 1997, les titres et les noms de professions au féminin dans les textes de l’Administration. L’Académie française a publié, en février 2019, un rapport intitulé La féminisation des noms de métiers et de fonctions, dans lequel elle expose ses recommandations sur le sujet.
Vous trouverez dans l’article Bibliographie sur la féminisation et la rédaction épicène les références de nombreux ouvrages sur le sujet provenant de divers pays francophones.
11. Une femme peut-elle choisir de se faire appeler par le nom masculin de sa fonction?
L’Office québécois de la langue française recommande, pour désigner une femme, l’emploi d’une appellation de personne au féminin. Toutefois, si une femme tient à se faire désigner par un titre de fonction au masculin, par exemple Madame le président, Madame le directeur ou Madame le maire, la politesse exigera que l’on respecte son choix. Il faut savoir que cet usage est peu répandu au Québec.
12. Peut-on écrire un texte uniquement au féminin?
Il faut garder à l’esprit que le genre féminin n’a pas de valeur générique en français. Ainsi, il demeure préférable d’écrire en s’adressant à toutes et à tous, même dans les milieux de travail où le personnel est constitué d’une majorité de femmes, par exemple dans les services de garde à l’enfance, et où il peut alors être tentant de rédiger des textes uniquement au féminin. L’objectif de la rédaction épicène est de parvenir à des écrits plus inclusifs.