Aide-mémoire sur la féminisation lexicale et la rédaction épicène
Pour éviter le seul recours au masculin générique (c’est-à-dire au genre masculin employé pour désigner autant les hommes que les femmes) lorsqu’il est question de personnes, on peut faire appel à la féminisation lexicale, qui touche les mots, et à la rédaction épicène, qui touche le texte.
Éléments essentiels sur la féminisation lexicale
Formation régulière des appellations au féminin
Les appellations au féminin correctement formées sont celles qui doivent être utilisées, notamment en ce qui a trait aux finales des appellations féminines correspondant à des noms masculins en ‑eur : analyste-programmeuse et non *analyste-programmeure, administratrice et non *administrateure, par exemple.
Formation de noms féminins par l’ajout du mot femme : un cas particulier
La formation du féminin par l’ajout du mot femme à une appellation de personne, comme dans femme médecin, n’est pas conseillée puisqu’au masculin, on n’emploie pas homme médecin. Il est toutefois possible, pour les appellations qui comportent déjà le mot homme, de remplacer ce dernier par femme (homme d’affaires, femme d’affaires). Dans le cas d’un passage du féminin au masculin, on appliquera la même logique. Ainsi, on aura femme de ménage et homme de ménage, et non homme femme de ménage.
Appellations de personnes polysémiques
Certaines appellations de personnes sont polysémiques (elles possèdent plus d’un sens), mais comme pour d’autres noms polysémiques en français, cela ne constitue pas un problème, ni pour les appellations au masculin, ni pour les appellations au féminin. Par exemple, le mot débardeur désigne aussi bien une personne qu’un vêtement, le mot secrétaire évoque à la fois un meuble et une personne, et le mot cuisinière désigne une personne ou un appareil électroménager.
Appellations de personnes formées par ellipse
Certains noms de forme complexe sont construits par ellipse. Une appellation formée par ellipse est plus synthétique que la formulation régulière. De ce fait, la relation de sens entre l’adjectif et le nom qu’il caractérise est parfois difficile à comprendre. Par exemple, un représentant syndical n’est pas vraiment « syndical ». L’expression de base pourrait être représentant du syndicat. Ce type de formulation est courant et il s’inscrit dans la tendance à raccourcir le discours. Les ellipses sont acceptées, mais il faut savoir que certaines créent des réticences. Cependant, l’ellipse n’est pas plus incongrue au féminin qu’elle ne l’est au masculin; c’est seulement que le féminin est parfois moins fréquent, donc il surprend davantage. Dans de tels cas, il faut veiller à bien féminiser : un biologiste marin, une biologiste marine et non une biologiste marin.
Éléments essentiels sur la rédaction épicène
Appellations générales et particulières
Le masculin générique peut être employé pour certaines appellations générales, tandis que les doublets peuvent être employés en priorité pour les appellations particulières. Prenons par exemple la phrase Le dessinateur ou la dessinatrice doit adapter sa caricature aux lecteurs du magazine. D’une part, les appellations dessinateur et dessinatrice renvoient à une personne particulière (dont l’identité est toutefois indéterminée) : celle qui dessinera; il est alors préférable d’opter pour le doublet. D’autre part, l’appellation lecteurs constitue une appellation générale dans la mesure où elle renvoie à un ensemble de personnes, soit toutes celles qui liront. Dans ce cas, l’emploi du masculin générique peut alors être une solution acceptable pour éviter la multiplication des doublets ou des formulations neutres.
Emploi des doublets complets
Le masculin générique doit être utilisé avec parcimonie, en alternance avec les doublets complets et la formulation neutre (notamment l’emploi des noms collectifs et des tournures épicènes). L’appellation au masculin générique, par exemple dans l’électeur votera lundi ou bien les électeurs voteront lundi, est censée désigner autant les hommes que les femmes. Pour que la phrase tienne compte aussi bien des femmes que des hommes de manière plus évidente, on peut utiliser le doublet complet : l’électeur ou l’électrice votera lundi; les électrices et les électeurs voteront lundi. Ainsi, la présence des femmes est soulignée.
Ordre des appellations dans un doublet
L’ordre des noms qui forment un doublet est généralement libre. Lorsqu’il n’y a pas d’accord grammatical à faire, avec un adjectif par exemple, on placera indifféremment le nom masculin ou le nom féminin en premier dans la phrase. Cependant, s’il y a un accord à faire, celui-ci devant se faire au masculin, le nom masculin sera placé à côté du mot à accorder. C’est ce qu’on appelle la règle de proximité; par exemple : Les conseillères et les conseillers concernés seront présents à la réunion.
Emploi des doublets abrégés
Il convient de privilégier les doublets complets. On emploiera les doublets abrégés seulement dans les contextes où l’espace est restreint (tableaux et formulaires, notamment), par exemple dans Employé(e) visé(e) ou Signature du (de la) conseiller(‑ère).
Formulation neutre (noms collectifs et tournures épicènes, notamment)
Lorsque l’on recourt à la formulation neutre, on peut choisir un nom collectif (les électeurs devient l’électorat), utiliser des adjectifs épicènes (spécialisé en devient spécialiste de), tirer profit de pronoms épicènes (celui qui devient quiconque) ou rédiger des phrases épicènes (l’étudiant doit payer la taxe le premier jour du mois devient la taxe est payable le premier jour du mois).
Emploi du nom personne
Il faut veiller à simplifier au maximum les expressions en écrivant, par exemple, les responsables de la formation plutôt que les personnes responsables de la formation. Le nom personne peut être utilisé lorsqu’une appellation n’est pas épicène (la personne immigrante en alternance avec les immigrants ou les immigrantes) ou lorsqu’il fait partie d’une appellation figée, comme dans personne malentendante ou personne autiste.
Appellations de personnes qui demeurent au masculin
Il faut reproduire fidèlement les noms d’entreprises, les noms d’associations et d’ordres professionnels, les citations, les textes de loi et les documents juridiques, ainsi que les appellations officielles de ministères ou d’organismes formulées au masculin. Au Québec, par exemple, protecteur du citoyen désigne à la fois une personne et, avec la majuscule, une institution. Si la fonction est occupée par une femme, on emploiera protectrice du citoyen pour désigner cette dernière, mais Protecteur du citoyen quand il est question de l’institution qu’elle dirige.