L’expression frais émoulu
L’expression figée frais émoulu (ou fraîcheSelon les rectifications de l’orthographe, on peut aussi écrire : fraiche. émoulue) a le sens de « récemment formé, sorti depuis peu d’une école », alors que frais moulu se dit de ce qui vient d’être broyé ou réduit en poudre. Ces expressions, construites avec les verbes émoudre et moudre, ont une étymologie commune.
Frais émoulu et frais moulu
La locution frais émoulu, attestée dès le XVIe siècle, signifie « récemment formé, sorti depuis peu d’une école ».
- Certaines sociétés n’engagent que des diplômés frais émoulus de l’université.
- Fraîche émoulue du conservatoire, cette interprète talentueuse aura sans doute une carrière florissante.
Il faut veiller à ne pas confondre frais émoulu, dont l’emploi figuré est consacré, avec frais moulu, qui signifie « qu’on vient de broyer, réduire en poudre ».
- Ajouter du sel et du poivre frais moulu.
- Quelle odeur exquise que celle du café frais moulu!
Au figuré, moulu a le sens de « meurtri de coups » ou « exténué ».
- Je suis revenue du cours de danse aérobique complètement moulue!
Notons que les deux verbes présentent toutefois une parenté étymologique. En effet, le verbe émoudre vient du latin populaire exmolere « aiguiser sur une meule », qui est une réfection du latin impérial emolere « moudre ».
Origine de la locution frais émoulu
L’adjectif émoulu fut d’abord, sous la forme esmulu, attestée au XIIe siècle, le participe passé du verbe émoudre, alors esmoldre. Ce verbe archaïque signifiait « aiguiser sur une meule ». Si émoulu eut d’abord le sens technique d’« aiguisé à la meule », il fut ensuite plutôt utilisé par métaphoreFigure de style qui consiste à établir un rapport de ressemblance entre deux réalités distinctes sans recourir à un outil de comparaison. Par exemple : « Qu’est devenu mon cœur, navire déserté? » (Nelligan). dans certaines expressions. Ainsi, la locution frais émoulu se disait déjà au XVIe siècle d’une personne qui, sortant tout juste d’un endroit où elle avait reçu une formation, n’avait rien perdu de l’enseignement qu’elle y avait reçu, était « aiguisée » comme une lame fraîche émoulue.
Se battre à fer émoulu
On trouve aussi l’expression littéraire se battre à fer émoulu, qui signifie « se battre avec des armes bien affilées », par analogie avec le tranchant sans défaut des lames émoulues. Dans les tournois et les joutes, les chevaliers combattaient d’ordinaire avec des armes émoussées (dites courtoises), mais parfois aussi à fer émoulu, avec le tranchant et la pointe de l’épée. On dit aussi au figuré se battre à fer émoulu au sens de « se livrer une lutte sans merci, ne pas s’épargner ».