Les homophones abîme et abyme
Abîme et abyme sont des homophones, c’est-à-dire des mots de même prononciation qui n’ont pas le même sens. Ces deux noms ont la même origine et sont tous deux de genre masculin, mais ils n’ont plus les mêmes emplois.
Abîme
Abîme s’écrit avec un accent circonflexe sur le i dans la plupart de ses emplois. Cet accent indique que le i était auparavant suivi d’un s (on avait en latin abismus). Selon les rectifications de l’orthographe, on peut maintenant supprimer l’accent circonflexe sur ce i; ainsi, les graphies avec et sans accent circonflexe sont dorénavant acceptées.
Abîme : sens concret et figuré
On emploie couramment abîme dans un sens figuréSens abstrait et imagé d’un mot ou d’une expression. Par exemple, le mot chemin est utilisé au figuré dans le chemin de la vie. pour exprimer un écart, un fossé entre des personnes ou des choses. Cet emploi vient du sens concret du mot, « précipice, cavité très profonde », aujourd’hui considéré comme littéraire.
- Il y a un abîme important entre ce qu’il désire faire et ce qu’il fait vraiment.
- Un abîme infranchissable existe depuis toujours entre ces deux personnes.
- Nous sommes allés voir de près une maison abandonnée située au bord d’un abîme.
Abîme : sens étendu
Par extension de sensFait de donner à un mot ou à un groupe de mots un sens nouveau, connexe à son sens d’origine ou plus large que celui-ci. Par exemple, le mot bureau, « meuble, table de travail servant à écrire », a acquis par extension le sens de « pièce dans laquelle se trouve un bureau »., abîme peut aussi exprimer l’idée d’une perte, d’un désastre ou de circonstances difficiles, voire tragiques.
- Notre économie n’est plus au bord de l’abîme.
- Après avoir touché le fond de l’abîme, j’ai finalement repris ma vie en main.
Abîme : langue soutenue et littéraire
Enfin, dans la langue soutenue ou littéraire, abîme peut se dire d’une chose impénétrable, insondable, en parlant entre autres d’un mystère, d’une énigme. La locution un abîme de sert quant à elle à exprimer l’idée d’un degré extrême, très élevé de quelque chose.
- Je souhaite me perdre à jamais dans l’abîme obscur qu’est son cœur.
- La relation entre elle et sa mère est un abîme de tendresse et d’amitié.
Abyme
En abyme
Le nom abyme ne s’écrit avec un y que dans la locution en abyme (plus rarement écrite en abîme par certains auteurs), qui se dit d’une œuvre (récit, film, peinture) dans laquelle des éléments récurrents sont enchâssés les uns dans les autres.
- Ce roman présente un récit en abyme qui parle du personnage principal lorsqu’il était enfant. (ou, plus rarement : un récit en abîme)
Mise en abyme
En littérature, le procédé de mise en abyme consiste à inclure une histoire secondaire dans l’histoire principale d’une œuvre de fiction. Ce second récit a la particularité d’être un résumé du récit principal, ou du moins de présenter un rapport de similitude avec celui-ci; il peut ainsi aider le lecteur à mieux comprendre le sens global de l’œuvre.
- La redondance est surexploitée dans ce film qui accumule les mises en abyme. (ou, plus rarement : les mises en abîme)
La mise en abyme : origine et présence du procédé dans les œuvres
L’expression mise en abyme a été empruntée à l’héraldique (où elle désigne l’insertion d’un blason dans un autre blason) par le romancier André Gide pour illustrer le procédé qu’il a utilisé dans son œuvre Les faux-monnayeurs. Dans ce roman, on peut lire le « Journal d’Édouard », qui est une histoire en soi, mais qui est aussi analogue à l’histoire principale.
On trouve d’autres exemples de ce procédé, notamment dans l’œuvre de Diderot intitulée Jacques le fataliste et son maître, dans laquelle l’histoire de Mme de La Pommeraye est une histoire à l’intérieur de l’histoire principale. On peut aussi citer l’histoire d’« Un amour de Swann », que l’on trouve dans le roman de Proust À la recherche du temps perdu.