Le point sur l'usage des mots race, raciser et racialiser
Dans le domaine de la zoologie, race désigne une subdivision de l’espèce qui concerne essentiellement les animaux domestiqués (chien, chat, cheval, vache, poule, etc.) dont l’élevage et la sélection ont permis de modifier des caractéristiques physiques afin de les adapter à des conditions spécifiques. Par exemple, la chantecler est une race de poule conçue par hybridation pour mieux répondre aux rigueurs de l’hiver québécois : pattes, crête et barbillon plus courts pour résister au froid, ponte malgré le faible ensoleillement, etc.
En biologie humaine, le terme race est utilisé depuis le XVIe siècle. Il désignait alors l'ensemble des membres (ascendants et descendants) d'une même famille ou d'un même peuple. Au cours du XVIIIe siècle, un découpage de l’espèce humaine en races distinctes est tenté. Cette idéologie servira d'assise au racisme et à ses manifestations, qui atteindra son apogée lors de la Seconde Guerre mondiale. Par la suite, la communauté scientifique internationale s’est appliquée à démontrer le caractère non fondé du concept de « race humaine », en concluant que tous les humains appartiennent à la même espèce et possèdent un ancêtre commun. Ainsi, bien que le mot race soit parfois employé pour désigner arbitrairement un « regroupement d'êtres humains qui se distingueraient par des traits physiques communs héréditaires, généralement la couleur de leur peau », il n’y a pas de races humaines, génétiquement parlant. De ce fait, le terme race, lorsqu’il s’agit de parler d’humains, est perçu par certains comme étant porteur d'une charge péjorative. Cet emploi disparaît progressivement des documents officiels.
Ces dernières années, de nouveaux dérivés du mot race sont apparus. En effet, le verbe raciser et l’adjectif racisé ainsi que le nom racialisation sont désormais présents dans certains dictionnaires et dans le vocabulaire psychosocial, et ont engendré d’autres formes apparentées, ayant plus ou moins le même sens, mais moins usitées : racialiser, racialisé, racisation. La formation de ces mots, par dérivation affixale, est conforme aux règles du français.
Parmi ces nouveaux dérivés, racisé est celui qui est le plus souvent recensé par les dictionnaires, comme adjectif et comme nom. Il existe un flou sémantique autour de ce terme, même au sein des groupes minoritaires concernés. Il est notamment employé pour désigner une personne ou une population « touchée par le racisme » ou, dans une société majoritairement blanche, « qui n’a pas la peau blanche, sans égard au lieu de naissance ou à la citoyenneté ». L’usage relève également un troisième emploi, plus spécifique, celui de « qui a la peau noire, qui est d’ascendance africaine ». Ces emplois sont notamment en usage parmi les membres des collectivités concernées pour se désigner.
Bien que les mots racisé et racialisé soient correctement formés, si l’on choisit de les utiliser, il faut le faire avec prudence. En effet, ils peuvent être interprétés de différentes manières et être porteurs d’une charge péjorative. Pour ces raisons et pour éviter d’utiliser un dérivé du mot race, on pourra employer, selon le contexte, des formulations comme membre d’une communauté ethnique, issu de minorités visibles, personne noire, communauté noire, non-Blanc, discriminé en fonction de la couleur de sa peau, etc., qui sont susceptibles d’être plus précises et plus claires.